Revenus du bout du bout du monde… en Tierra del Fuego

Alors par où faudra-t-il commencer ? Nous voilà de retour à Punta Arenas avec dans la tête, qui tournent, les émotions et images de ces 4 derniers jours…

D’ailleurs en fait pour tout vous dire, on ne voulait vraiment pas en repartir. On voulait rester là, parce que tout dans cet endroit nous plaisait…

Il y a les rues silencieuses de ce petit village qui semble endormi même aux alentours de midi, il y a la lumière étrange tantôt lumineuse, tantôt douce et vaporeuse qui s’infiltre sur le Canal de Beagle, sur les maisons colorées, et le quartier des nouvelles « maisons blanches » à l’entrée du village… sur les montagnes rouges/oranges qui nous accueillent quand on arrive… sur ces montagnes, enneigées qui nous font face côté argentin… ici la neige est annoncée pour le mois de mai, nous voilà donc ici juste au bon moment… les gens font des réserves de bois, arrivées en pelleteuse, directement dans le jardin !

On pourrait passer des heures à trouver les bons mots pour ce bout du monde… en réalité, au fond, on n’en est toujours pas revenu…

Le premier jour c’était balade dans ce village du bout du monde, visite du musée (découvertes d’artistes, des animaux du coin, et surtout de l’histoire des Yaghans, peuple d’indien qui vivaient sur l’Isla Navarino et de la dernière femme Yaghan, qui continue de transmettre l’histoire de ce peuple…), découverte d’un café tout douillet en face de l’embarcadère « Puerto Luisa café » (et non pas de gâteaux ce jour là n’en déplaise aux mauvaises langues !).

Pour le lendemain il est prévu de faire une balade dans les « Dientes », et de s’arrêter au premier point ! c’est 5h de marche au milieu des arbres aux couleurs orangés (terre couleur de feu quand tu nous tiens..), dans cette nature si riche et si énergisante ! Pas de tout repos cette balade qui grimpe en permanence (enfin surtout pour certaine !), mais on y arrive avec quelques pauses aux miradors pour apprécier la vue. Là haut le vent est un jeune fou qui nous récupère une fois le drapeau en vue ! Et il ne semble pas vouloir s’arrêter là. On prend quelques photos, le temps de faire un petit « inuk shuk » du bout du monde, d’avancer vaille que vaille jusqu’aux prochaines collines qui permettent de voir le Lago Robado…. Et là en 10 min les nuages recouvrent le sommet des montagnes, le vent se fait terrible, la neige vient nous fouetter le visage et la grêle nous « pousse » vers le bas…
Mais on est tout heureux : on a réussi à tout voir, à profiter des rayons du soleil tout en haut, d’admirer la vue avec le regard qui surplombe le Canal, les montagnes argentines en face et les nuages qui frôlent les dessus blancs… avec l’eau bleue qui scintille, les rapaces dont les cris se font échos, la lumière absolument dingue qui s’infiltre de par et d’autres des montagnes, dans les plis du village et changent d’un pays qui fait face à l’autre… c’est sauvage… complètement sauvage…

Oui on n’en revient pas…

Dimanche on part tôt, rdv à 7h30 pour prendre le bateau… oui enfin le bateau direction Puerto Toro ! Comme on en avait envie de cette sortie aussi ! Le réveil est facile, on y va avec un couple franco-argentin rencontré à l’hôtel. Regarder le soleil se lever sur le Canal en direction du sud le plus loin et le plus profond, c’est quelque chose de magique. La vie reprend au dessus de l’eau quand les rayons apparaissent… les lions de mer, toujours aussi drôles nous on accompagnés tout le long, et ont joué autour du bateau, toujours fugaces… Les dauphins ont fini par les rejoindre en sautant entre les vagues que le bateau créait… qu’ils étaient beaux et joyeux ! De loin ce sont les vieilles dames de la mer qui nous ont salués à coup de « geysers » d’eau, balancés de temps en temps.
Puerto Toro est donc plus bas que Puerto Williams, c’est un tout petit village de pêcheurs, ils ne sont qu’une petite quarantaine à vivre ici, familles comprises. Alors oui cette fois on est au plus bas de tout ! Après c’est l’Antarctique… la promesse d’un lointain qui s’arrête. C’est bizarre hein de se dire une chose pareille… qu’après, la terre se « finit ». (les rabats joie qui diront que la terre est ronde… oui on le sait). Mais après il n’y a rien… des manchots empereurs, quelques scientifiques et rares photographes…

On repart, on fait un court arrêt à Puerto Williams pour en laisser certains et en prendre d’autres… un dernier moment « chez Luisa » avant de partir…

Cette envie très forte de faire ce voyage en bateau prend légèrement le pas sur le déchirement qui se produit quand nous quittons ce village… l’émotion un peu forte au creux du cœur. On a deux heures avant que le soleil ne se couche, le temps de voir les baleines, ces vieilles dames, de plus près, de crier de joie sur le pont, de s’amuser des lions de mer qui prennent leur temps et nous font des coucous depuis l’eau froide, des albatros plein de fierté qui nous passent devant, d’apercevoir Ushuaïa et de longer la ville… d’être subjugué par les couleurs qui glissent sur le Canal et les montagnes avec l’orangé/rose du couché de soleil… et la nuit noire qui nous rattrape.
Un peu de mouvement vers 6h du matin, et au moment du petit déj (ceux qui rigolent une fois de plus devant leur écran, attendez de faire la même !) sinon tout est calme. Le temps est maussade le lundi. Mais les côtes des îles que nous voyons se font mystérieuses et un brin mystique avec la brume qui les arpente…


On passe devant un magnifique glacier (pile poil au bon moment avec la bonne lumière), Anthony aura même la chance de voir des pingouins !
On a lancé quelques vœux à la mer pour quelle l’emporte loin tout au bout…

Finir cette parenthèse patagonienne en bateau est encore plus magique… mais quand on voit les lumières de Punta Arenas le pincement au cœur nous reprend… on y est, on revient…

Il est des endroits beaucoup trop compliqués à expliquer, raconter… parce que, ce que l’on y vit nous dépasse, ne nous donne pas encore les mots… c’est presque trop fort pour être partagé de manière aussi « simple »…

On a laissé un petit bout de nous là-bas …  et à la fois emporté tout ce qui nous a traversés de manière si forte. C’est bien la première fois depuis le début de ce voyage que l’on est touché comme ça…

Nous voilà, plus riche de tout ça, encore un peu sonnés, prêts à repartir plus dans le nord, direction Valparaiso !


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"La vie, ce n'est pas seulement respirer, c'est avoir le souffle coupé".. Alfred Hitchkock

"Une joie inexplicable me prend toute entière. Il n’y a rien. Rien. Rien. Sinon des étendues illimitées qui profanent le regard et le forcent à se perdre." Patagonie Intérieure - Lorette Nobécourt